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14.01.2013 11:48 Il y a: 11 yrs
Categorie: Personnes et Famille
Auteur : France Charruyer, Avocat Toulouse - Conseil & Contentieux

Droit médical : Du Médiator à la pilule contraceptive, quelle responsabilité pour les laboratoires pharmaceutiques ?


Depuis plusieurs années, l’actualité est régulièrement émaillée de « scandales » sanitaires dans lesquels la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques est directement recherchée par des victimes de médicaments qu’ils ont conçus et fabriqués.
 
Dernier en date, celui des pilules contraceptives de troisième et quatrième génération, dans lequel une jeune femme, Marion LARAT victime d’un accident vasculaire célébral alors qu’elle absorbait ces types de pilules, poursuit un grand laboratoire médical ainsi que l’Agence Nationale de Sécurité des Médicaments (ANSM , ex-AFSSAPS).
 
Quelques mois après l’affaire du Médiator impliquant le laboratoire Servier, le débat relatif à la responsabilité des laboratoires médicaux est donc relancé.
 
L’examen de ces deux affaires nous donne l’occasion de revenir sur la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques, qui peut être recherchée tant sur le plan civil que pénal.

I - La responsabilité civile des laboratoires : entre faute et produit défectueux

Au plan civil, la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques peut être scindé en deux parties : d’une part le droit commun qui s’applique aux médicaments mis en circulation avant le 21 mai 1998, et d’autre part le droit spécial issu de la loi du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux qui concerne les médicaments mis en circulation après son entrée en vigueur.
 
Il est dont fondamental en la matière de déterminer la date de mise en circulation du médicament en cause pour déterminer s’il faudra appliquer un régime de responsabilité pour faute (pour les médicaments commercialisés avant le 21  mai 1998) ou de plein droit (pour ceux commercialisés après cette date).

Le Médiator et les pilules contraceptives : une responsabilité de droit commun

Introduit sur le marché en 1976, le Médiator obéit, à l’identique des pilules contraceptives de troisième et quatrième génération (qui ont été commercialisées au début des années 80), aux principes de la responsabilité civile des droit commun.
 
Dans ces deux affaires, la mise en jeu de la responsabilité civile des laboratoires sera donc soumise à la démonstration de trois conditions, conformément aux dispositions de l’article 1382 du Code civil : une faute, un préjudice et un lien de causalité.

la démonstration d’une faute :

En matière civile, une faute délictuelle se définit come un manquement à une obligation de prudence générale. Au plan médical et pharmaceutique, il appartiendra donc à la victime de rapporter la preuve d’une faute commise par le laboratoire dans la conception ou la fabrication du médicament.
 
Dans un premier temps, la jurisprudence avait adopté une positon peu favorable aux victimes puisqu’elle avait estimé que l’obligation de renseignement relative aux contre-indications et effets secondaires des médicaments ne pouvait s’appliquer qu’à ce qui était connu au moment de l’introduction du médicament sur le marché et à ce qui avait été porté à la connaissance des laboratoires depuis cette date. Ainsi la Cour de cassation avait estimé que la loi ne mettait pas à la charge des laboratoires l’obligation de prévoir tous les risques présentés par le médicament dans tous les cas. (Cass. 1ère civ., 8 avr 1986 : JCP 87, II, 20721, note Viala et Viandier).
 
La Cour de cassation avait par la suite infléchi sa position en estimant que la faute du laboratoire était établie si au regard des circonstances et notamment de la présentation du produit, de l’usage que le public pouvait raisonnablement en attendre, du moment de sa mise en circulation et de la gravité des effets nocifs constatés, le produit était défectueux. (Cass. 1ère civ., 5 avr 2005 : JCP G 2005, I, 149, n°7, obs. Viney).
 
La jurisprudence avait également estimé qu’en dépit des études soulignant  le  défaut  d’un  médicament, un laboratoire  manquait  à  son  obligation de  vigilance  en  distribuant  néanmoins ledit médicament (Cass. Civ 1ère 7 mars 2006,  n°04‐16180).
 
La jurisprudence a ainsi progressivement assoupli ses exigences en matière de démonstration des fautes commises par les laboratoires, rapprochant ce régime de droit commun de celui relatif à la responsabilité des produits défectueux.

La preuve du dommage :

Il est nécessaire de démontrer l’existence de dommages intrinsèquement liés à l’ingestion du médicament incriminé. Par conséquent, la victime devra apporter la preuve d’un élément préalable, à savoir l’ingestion du médicament, ainsi que celle des préjudices que ce dernier lui a causés (matériels, moraux, d’agrément, sexuels, etc.)

Il sera donc nécessaire pour la victime de soigneusement constituer un dossier médical comprenant :
 
  • la preuve de l’exposition au médicament en cause (prescriptions médicales, décompte de sécurité sociale, etc…)
  • la réalité dommage subi

La preuve d’un lien de causalité entre le dommage et la faute du laboratoire :

En matière de lien causalité, la jurisprudence a connu d’importantes évolutions. Il est désormais nécessaire et suffisant que la victime démontre qu’elle a bien été exposée au risque, c’est à dire qu’elle a ingéré le médicament.
 
En effet, la jurisprudence admet que le lien de causalité peut résulter de présomptions, pourvu qu’elles soient graves, précises et concordantes. (Cass. 1ère civ, 22 mai 2008, n°05-20.137 et n°06-10.967).
 
Ainsi dans un arrêt du 9 juillet 2009, la Première Chambre civile de la Cour de Cassation avait admis qu’il existait un lien de causalité entre le vaccin contre l’hépatite B et le développement chez les personnes vaccinées d’une sclérose en plaques, en raison de l’existence de présomptions graves, précises et concordantes. Pour justifier une telle approche, la Haute Cour s’était fondée sur la proximité temporelle entre la dernière injection et le déclenchement de la maladie, l’absence d’antécédents familiaux chez la victime et l’absence de toute autre cause pouvant expliquer la maladie. (Cass. 1ère civ. 9 juill. 2009, n°08-11.073 : Bull. civ. I, n°176).

Le régime spécial : la responsabilité des produits défectueux

La loi du 19 mai 1998 a institué un régime spécial de responsabilité du fait des produits défectueux. Ce régime, prévu aux articles 1386-1 et suivants du Code civil s’applique uniquement aux dommages causés par les produits dont la date de mise en circulation est postérieure au 21 mai 1998.
 
Ainsi et en application de l’article 1386-1 du Code civil « le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu’il soit lié ou non par un contrat à la victime ».
 
De manière identique au régime de droit commun, la victime devra rapporter la preuve d’un préjudice et d’un lien de causalité entre le dommage et le défaut (avec la possibilité de se fonder sur des présomptions comme évoquées précédemment). Toutefois, elle n’aura pas à rapporter la preuve d’une faute commise par le laboratoire, mais uniquement d’un défaut du médicament fabriqué par ce dernier.
 
Concernant le défaut du médicament, celui-ci est considéré comme défectueux lorsqu’il n’apporte pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre. Au terme des textes, l’appréciation de la sécurité se fait au regard de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l’usage qui peut en être attendu et du moment de sa mise en circulation.
 
Ainsi en matière médicale, il a été jugé qu’un produit était défectueux, puisqu’alors que la notice d’utilisation du produit remise aux médecins mentionnait le risque d’effets indésirables, la plaquette d’information communiquée à la patiente n’en faisait aucun état.
 
Il a également été jugé qu’un médicament était défectueux dans l’hypothèse où sa notice de présentation ne contenait à l’époque de sa mise en circulation, aucune information relative au risque de développement de la maladie (en l’espèce une sclérose en plaques), alors que le dictionnaire médical Vidal et la notice actuelle de présentation du produit faisaient mention de ce risque.

II - Les poursuites pénales, un complément indispensable aux poursuites civiles.

Parallèlement aux poursuites civiles, la victime peut avoir tout intérêt à déposer une plainte à l’encontre des laboratoires pharmaceutiques en cause, notamment en matière d’administration des preuves (une instruction étant systémtiquement ouverte, les victimes ne supporteront pas seules la charge de rapporter les éléments de preuve nécessaires à la caractérisation de l’infraction).
 
La plainte déposée au titre d’une infraction pénale particulière (mise en danger de la vie d’autrui, blessures involontaires, etc.), pourra viser ledit fabricant, ou être déposée contre X, afin d’élargir au cour de l’instruction la chaîne des responsabilités (Médecin prescripteur, Agence Nationale de Sécurité du Médicament, etc.)
 
La finalité de cette procédure est toutefois totalement différente des poursuites civiles, puisqu’alors que cette dernière vise à obtenir l’indemnisation des préjudices subis par la victime, la première a pour objet de parvenir à la condamnation à des peines d’amende ou d’emprisonnement des acteurs mis en cause.

L’on voit donc que la mise en jeu de la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques est particulièrement complexe, et l’on ne peut donc que trop conseiller aux victimes qui souhaiteraient agir à leur encontre, de faire appel à l’assistance et au conseil d’un avocat spécialiste et expérimenté en la matière.